Auteurs : Handicap International, UNICEF, UNHCR, Plan International, Sightsavers, etc.
Site de publication : Handicap International
Type de publication : Rapport
Date de publication : Novembre 2020
Les filles et garçons handicapés d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale ont les mêmes droits que tous les enfants à une éducation inclusive de qualité. Celle-ci doit leur permettre de participer activement et de manière significative aux apprentissages et à la société. Pourtant, à l’heure actuelle, ces enfants sont largement exclus du système éducatif et des possibilités d’apprentissage. Et lorsqu’ils sont scolarisés, les enfants handicapés sont largement lésés, du fait de leur handicap, dans leur apprentissage et leur réussite scolaires en raison d’inégalités systémiques et d’un enseignement et d’une gouvernance de mauvaise qualité.
L’éducation est un droit humain fondamental. Il est universel et indivisible, et inscrit dans nombre de conventions et accords internationaux dont la Convention des Nations Unies relative aux Droits des Personnes Handicapées (CRDPH) et les Principes d’Abidjan. Les États qui signent et ratifient la CRDPH s’engagent à en respecter les principes et idéaux, et à prendre les mesures législatives, administratives et juridictionnelles nécessaires à la mise en œuvre de ses dispositions. Par ailleurs, le 4e Objectif de Développement Durable (ODD) fait clairement référence à la nécessité de dispenser une éducation inclusive, équitable et de bonne qualité qui ne laisse personne de côté. Cette promesse de mettre fin à l’exclusion a également été réitérée comme engagement phare du Sommet Humanitaire Mondial de 2016.
Les inégalités systémiques sont la cause première de l’exclusion de l’école des apprenants handicapés. On estime qu’entre 93 et 150 millions d’enfants sont handicapés dans le monde. Faute de chiffres précis sur la prévalence du handicap à l’échelle des pays, les données sont peu fiables, ce qui complique d’autant l’analyse et l’estimation de l’ampleur du défi.
Toutefois, selon une récente étude relativement robuste portant sur les pays à revenus faibles ou intermédiaires, on estime qu’environ 40 % d’enfants handicapés sont non scolarisés au primaire et 55 % pour le premier cycle de l’enseignement secondaire. Une autre étude menée dans 15 pays à revenus faibles ou intermédiaires a montré que la probabilité pour un enfant handicapé d’être scolarisé est inférieure de 30,9 points de pourcentage en valeur médiane par rapport aux enfants non handicapés.
Les freins à l’éducation inclusive des enfants handicapés en Afrique de l’Ouest et en Afrique Centrale
Volonté politique, cadres institutionnels et financement
L’absence de volonté politique pour appliquer la législation et de politiques d’éducation inclusives sont des obstacles majeurs à l’éducation inclusive. Parmi les pays AOC, très peu se sont dotés d’une politique d’éducation inclusive (les exceptions étant le Ghana, le Libéria, le Nigéria, et la Sierra Leone). Ces insuffisances empêchent la mise en place de l’architecture institutionnelle nécessaire pour engager les réformes permettant de rendre les systèmes éducatifs plus inclusifs. Au niveau des politiques publiques, il en découle un manque de généralisation des principes d’inclusion au sein des ministères de l’éducation, l’absence de référents Inclusion au niveau central et local, ainsi qu’un manque de moyens financiers et de capacités techniques.
Exclusion : stigmatisation et discrimination
La stigmatisation et la discrimination sont des barrières importantes à l’inclusion des enfants handicapés dans les écoles d’AOC. Elles résultent souvent d’une mauvaise connaissance ou plus largement d’un manque de compréhension de ce qu’est le handicap au niveau des parents, des enseignants et plus largement de la population. À cause de certains mythes, croyances ou coutumes, les enfants handicapés ne peuvent pas saisir les opportunités qui leur sont offertes ; ils sont souvent invisibles au sein de leurs communautés parce que leurs parents les tiennent à l’abri des regards ou les gardent à la maison pour les protéger.
Les inégalités systémiques sont la cause première de l’exclusion de l’école des apprenants handicapés. On estime qu’entre 93 et 150 millions d’enfants sont handicapés dans le monde. Faute de chiffres précis sur la prévalence du handicap à l’échelle des pays, les données sont peu fiables, ce qui complique d’autant l’analyse et l’estimation de l’ampleur du défi
En conséquence, les enfants handicapés ont peu d’interactions avec les autres enfants, ce manque de stimulation limitant d’autant l’acquisition de compétences sociales essentielles. Beaucoup de parents d’enfants non-handicapés craignent que la présence d’un élève handicapé en classe ralentisse la progression scolaire de leurs propres enfants, voire même qu’elle soit un risque de contagion physique, mentale, voire spirituelle.
Équipements et infrastructures
Les obstacles environnementaux auxquels sont confrontés les apprenants handicapés sont notamment les aménagements scolaires et le transport. Le mauvais état des routes dans la région, les longues distances à parcourir pour se rendre à l’école et l’absence de modes de transport accessibles excluent les enfants handicapés de l’école tout simplement parce qu’ils ne peuvent pas se rendre dans les lieux d’apprentissage.
Le manque d’équipement et d’appareillage pour les enfants handicapés visuels, auditifs, locomoteurs ou cognitifs peut constituer un frein important pour accéder à l’éducation dans les pays AOC, à commencer parfois par le simple fait qu’il n’y ait pas de lunettes disponibles.
Opportunités
Un regain de volonté politique qui se reflète dans les politiques publiques et la collecte des données
Le plan d’action de l’Union Africaine en faveur de l’inclusion et de l’autonomisation des personnes handicapées dans le cadre du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples marque une nouvelle ère de soutien politique. Le nombre limité de services d’éducation spécialisée pousse également les gouvernements à investir dans l’éducation inclusive dans le cadre d’un renforcement global des systèmes éducatifs.
Une expertise régionale croissante en matière d’éducation inclusive offre des perspectives de changement. Des partenaires comme la Fédération Ouest-Africaine des associations de Personnes Handicapées (FOAPH), ainsi que des ONG nationales et internationales ont acquis une expertise solide sur les questions de genre, de handicap, d’équité et d’éducation inclusive.
Depuis la déclaration de Salamanque liv, largement adoptée par les pays AOC, puis dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine et dans l’Agenda 2030 des Nations Unies pour le développement durable, l’équité et l’inclusion sont désormais considérés comme des éléments fondamentaux d’une éducation de qualité.
Toutefois, selon une récente étude relativement robuste portant sur les pays à revenus faibles ou intermédiaires, on estime qu’environ 40 % d’enfants handicapés sont non scolarisés au primaire et 55 % pour le premier cycle de l’enseignement secondaire. Une autre étude menée dans 15 pays à revenus faibles ou intermédiaires a montré que la probabilité pour un enfant handicapé d’être scolarisé est inférieure de 30,9 points de pourcentage en valeur médiane par rapport aux enfants non handicapés
Compte tenu des besoins considérables de financement international estimés à 39 milliards de dollars par an lvii pour dispenser d’ici 2030 une éducation de qualité à tous les enfants de la maternelle jusqu’à la fin du secondaire, les principaux financeurs affichent aujourd’hui un regain d’intérêt pour le financement de l’éducation inclusive, en mettant l’accent sur le genre et le handicap. Plusieurs d’entre eux encouragent le financement de l’éducation inclusive au travers des plans et programmes sectoriels pour l’éducation.
Recommandations
Au niveau politique et institutionnel
Les bailleurs doivent soutenir l’éducation inclusive : Les bailleurs internationaux et multilatéraux ainsi que l’ensemble des partenaires du développement qui investissent dans les programmes d’éducation devraient renforcer leur soutien aux approches intégrant le handicap et le genre, et définir des critères et indicateurs d’inclusion clairs pour les bénéficiaires. Les bailleurs devraient envisager d’augmenter leur financement ciblé pour permettre aux pays concernés de combler les déficits identifiés au niveau des services d’éducation inclusive dans le cadre de leurs plans sectoriels.
Les gouvernements doivent définir clairement l’ensemble des ressources nécessaires pour mettre en œuvre les politiques d’éducation inclusive et les plans de l’éducation, ainsi que la manière dont ces derniers seront financés.
Les politiques d’éducation inclusive et leur financement doivent être des questions transversales : Les pays doivent adopter une approche globale de lutte contre l’exclusion de l’éducation couplée à une politique d’éducation inclusive transversale, assortie d’actions et de budgets concrets.
Accès
Dispenser un enseignement primaire gratuit, et fournir des appareillages et des ressources pédagogiques pour faciliter l’accès à l’éducation pour tous. Des aides financières directes sous forme de subventions et de bourses devraient être accordées pour les enfants handicapés ayant des besoins spécifiques et qui viennent de familles très défavorisées, en coordination avec les ministères concernés.
Réformer le rôle des écoles spéciales et les aider à devenir des centres de référence pouvant apporter un appui technique aux écoles ordinaires.
Crises et conflits
Renforcer la collaboration entre les acteurs humanitaires et du développement pour améliorer l’accès à une éducation inclusive et équitable pour tous les enfants et jeunes handicapés touchés par une crise ou un conflit.
Mobiliser un financement et une expertise technique inclusifs pour élaborer des plans de résilience et de préparation aux crises afin de reconstruire en mieux et de faire en sorte que personne ne soit laissé pour compte.